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La tribu des Sentinelles mise en danger par un missionnaire américain 

Un américain de 26 ans, John Allen Chau, a tenté d’entrer en contact avec les Sentinelles, une des dernières communautés autochtones insulaires (archipel des Andaman, Inde) farouchement déterminée à ce que le monde du dehors la laisse en paix sur son île.

Les Sentinelles craignent plus que tout, ceux venus du monde du dehors qui tentent de poser le pied sur leur île. John Chau a été fléché en tentant d’approcher la tribu avec la folle intention de l’évangéliser et de lui faire connaître le message du Christ ! Une aventure aussi insensée et dangereuse pour lui que destructrice pour les Sentinelles s’il avait pu la mener à son terme. Les pêcheurs indiens qui l’ont aidé à monter son expédition ont quant à eux été arrêtés et emprisonnés à Port Blair, la capitale administrative de l’archipel.

J’avais pour ma part approché cette île en 1991 en prenant soin de naviguer a plus d’une portée de flèches des côtes et j’avais pu alors comprendre la détermination salvatrice des Sentinelles à éloigner les intrus qui tentaient de s’approcher de leur île.

Je l’ai encore mieux compris, lorsqu’à la fin des années 90 et au début des années 2000, une autre tribu de l’archipel, les Jarawa, a finalement accepté un premier contact avec les gardes côtes indien qui tentaient de la pacifier. Il faut dire que l’île des Jarawa est l’île la plus vaste de l’archipel, que la pression des colons indiens y est de plus en plus forte. 

Au nombre de 150 000 au début des années 90 ils sont aujourd’hui près de 600 000. La déforestation y est en cours, le tourisme s’y développe et on ne peut que constater aujourd’hui la fin dramatique des derniers Jarawa, touchés par des épidémies ravageuses (tuberculose, Sida, etc.) et par la destruction irréversible de leur milieu de vie et des forêts nourricières qui leur permettaient jusqu’au début des années 2000 de vivre leur vie de chasseurs cueilleurs itinérants.

J’ai pu en 2003 partager le quotidien des Jarawa, et j’ai été profondément touché par la profonde humanité, la joie de vivre, la spiritualité animiste  et  la grande sagesse de ce peuple ultime de chasseurs cueilleurs itinérants qui vit dans le respect de la nature et de toutes formes de vie.

L’île de North Sentinelle est trop petite et trop éloignée des autres îles de l’archipel pour représenter un quelconque intérêt économique ou touristique. Elle n’est habitée que par la seule tribu des Sentinelle, entre 50 et 200 personnes qui vivent en autarcie de chasse, de pêche et de cueillette.
C’est pourquoi, jusqu’à ce jour, les autorités indiennes ont préféré en interdire l’approche et l’accès.

C’est une très bonne chose et il est à souhaiter que ces mesures de protection se poursuivent et soient encore plus fermes pour respecter le choix de cette tribu insulaire, dont l’apparente agressivité n’a pour seule raison que le puissant désir de continuer à vivre comme elle l’a toujours fait sur son île et de protéger ses enfants d’un monde du dehors dont elle sait, consciemment ou inconsciemment, que ce monde du dehors causera sa perte dès le premier jour ou un contact sera établi.

Patrick BERNARD
Illustration : Jarawan contemplant l'océan

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